Dos à dos
Villers, terrain à construire…
Dos à dos est une rencontre photographique qui donne à voir en une traversée
paysagère double la périphérie et les limites tangibles et invisibles de la commune
de Villers Bocage.
Cet échange expérimental croise le regard pensif et extérieur d’une artiste, Axelle
Rioult, et le point de vue à la fois cadré et impulsif de jeunes résidants villersois.
L’artiste a choisi un mode de présentation binaire, où chacune de ses images,
associées dos à dos à celle des jeunes, appréhende des fragments de territoire, des
zones indécises entre ruralité et urbanité, des étendues de pays criblées d’obstacles
visuels : voies de circulations, clôtures, panneaux de signalétiques etc.
Espaces verts, bâtiments à vocation commerciale, lotissements pavillonnaires,
terrains agricoles, routes goudronnées et sentiers pédestres. Ces espaces ordinaires
et parcellisés, apparaissent désertés et comme inachevés. Ils sont émaillés de
vides révélant une modification prochaine et inexorable comme destinés à évoluer
encore, à continuellement gagner les terrains alentours.
Tel un inventaire paysager, la succession de ces images interroge par son caractère
neutre et commun mais néanmoins rassurant, les épaisseurs temporelles et les
changements apparents qui sillonnent le territoire. Les constructions anciennes - en
pierre et en bois -, les sentiers terreux et les champs côtoient les parpaings et le
bitume des lotissements neufs, les routes et les zones dites artisanales ou
commerciales.
Issue d’une échappée entre l’artiste et les jeunes, intervenants à tour de rôle, cette
série témoigne alors d’un intérêt esthétique et sensible pour la brisure,
l’incomplétude, la limite, le vide ou encore la dispersion.
Ces successions de points de vue modélisent et s’accordent à montrer un équilibre
fragile à mesure que le bâti s’empare des étendues de nature. Elles laissent
néanmoins imaginer la façon dont on y vit et suggèrent les habitudes de ceux qui
empruntent ces voies, à la lisière de la ville et de la campagne.
Sur un mode alter ego, cette entrevue photographique offre un regard singulier sur
l’appropriation d’un territoire commun, substituant un moment de rencontre
exclusif voire intimiste à la solitude planante de ces espaces familiers.
Alexandra Spahn
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